Si Versailles m'était pixelisé

Comme vous dites! Mais les fêtes n'en paraissait que plus extraordinaires!
Imaginez le frissonnement de joie qui devait précéder le retour des lustres,  et l'excitation provoquée par leur accrochage à la voûte de la galerie !!!

La question est : où étaient-ils donc ainsi transportés ?

On les mettait en caisses individuelles avant de les déposer au garde-meuble du château auquel ils avaient été livré.

Versailles!

La galerie était ordinairement éclairée par 16 girandoles posées sur des guéridons livrés pour Louis XIV en 1690 (c'est l'état que montrent les vues de la Galerie "à l'ordinaire") augmentés à 24 en 1743 et renouvelés à l'occasion du mariage du futur Louis XVI et de Marie Antoinette (les 12 torchères aux enfants et les 12 torchères aux femmes, par Babel et Foliot, reconstitués en 1980).
Pour les lustres, j'avais lu qu'ils étaient loués pour ces fêtes, qui semble-t-il n'étaient pas si nombreuses que cela dans la Galerie. D'après Jeanne Faton (La Galerie des Glaces, dossier de l'art n°142), les fêtes ayant eu un éclat particulier et ayant amené la Galerie a être dotée de lustres sont : le mariage du duc de Bourgogne en 1697, le mariage de la fille ainée de Louis XV avec l'infant de Parme en 1739, celui du Dauphin en 1745 puis son remariage en 1747, la naissance du Duc de Bourgogne, fils ainé du Dauphin en 1751 et surtout le mariage du futur  Louis XVI et de Marie Antoinette (état actuellement reconstitué)en mai 1770  suivi de ceux du comte de Provence en 1771 et du comte d'Artois en 1773.
Ce qui nous fait 8 occasions en 80 ans!

C'est sous Louis XV que la location cessa. L'achat de lustres qui décoreraient la Grande Galerie fut conclue par les Menus Plaisirs à l'occasion des fêtes des fiançailles de Madame (infante).

Cf notamment :

Versailles au temps de Louis XV, 1715-1745

Alfred Marie, Jeanne Marie

Imprimerie nationale, 1984 - 617 pages

Mémoires sur la cour de Louis XV, 1735-58, Volume 3
Par Charles Philippe d'Albert Luynes (duc de)



Du Mercredi 26 août 1739, Versailles. — Hier se firent les fiançailles de Madame; l'heure étoit donnée à six heures et demie. Toutes les princesses et les grandes d'Espagne s'assemblèrent chez Madame. Mme de Clermont et toutes les autres dames étoient chez la Reine. M. le Dauphin donnoit la main à Madame, et la conduisit chez la Reine, où tout étant réuni, ou passa chez le Roi, où étoient tous les princes et tous les hommes de la Cour. Il y a ici de princesses : Mme la Duchesse mère, Mme la princesse de Conty, Mademoiselle, Mlle de Clermont, M"e de Sens, Mlle de la Roche-sur-Yon, et de légitimée : M"e du Maine. De princes : M. le duc d'Orléans, M. le duc de Chartres, M. le Duc, M- le comte de Charolois, M. le comte de Clermont, M. le prince de Conty, et de légitimés : M. le prince de Dombes, M. le comte d'Eu et M. de Penthièvre.
Presque toutes les dames restèrent dans le cabinet de la Reine, qui est le salon du bout de la galerie.

Un peu avant huit heures, la Reine se mit en marche, suivie immédiatement de Madame, de Mme Henriette et de Mme Adélaïde; ensuite Mme la Duchesse, les princesses de suite, ensuite Mme de Luynes et de Mazarin, les dames du palais, les dames d'honneur des princesses; toutes les autres dames suivoient. La Reine entra par la porte de glaces dans le cabinet de l'œil-de-bœuf. (La pièce de l'œil-de-bœuf est d'ordinaire l'antichambre du Roi; mais pour ce moment-là elle devint cabinet du Roi, les huissiers et les flambeaux de la Reine n'y pouvant entrer).

Toute la galerie étoit éclairée par des girandoles; les lustres n'étaient point allumés; (à l'occasion de cette fête on a acheté pour le roi un grand nombre de chandeliers de Bohême; on avait été obligé d'en louer en de pareilles occasions)...

Décoration du bal masqué donné par le roi dans la Grande Galerie de Versailles (1745).
Gravé par Ch.-N. Cochin le père.

Tous ces détails ! Nous y sommes !!!
Que de monde ! On entend le bruissement des voix, le froufrou des toilettes .
Merci, cher Diphyl, pour vos explications illustrées passionnantes ....

Entre nous, la galerie des Glaces, c'est bien à Versailles aussi ???

Merci! Je ne fais que transmettre des informations connues !!!



Les lustres en cristal de Bohème (en couleurs cette fois-ci !!!).

Charles-Nicolas Cochin Le Jeune, Bal masqué ou bal des Ifs donné pour le mariage de Louis Dauphin de France avec Marie-Thérèse d’Espagne dans la Galerie des Glaces, 1745, dessin à la plume et à l’encre, 44 x 76 cm, détail (PARIS, MUSÉE DU LOUVRE).

Merci Diphildor.
Je savais que des lustres avaient été achetés à un moment donné, mais j'ignorais exactement quand.
Cependant les lustres n'étaient sans doute qu'occasionnellement accrochés, car Louis XV, semble-t-il, tenait à ce que l'on puisse voir le décor peint de la voûte.

Quant à la gravure de Cochin, qui représente quelques unes de ces 15 000 personnes présentes dans le Grand Appartement, c'est sur elle que je me suis principalement appuyé pour reconstituer la galerie en fêtes.

C'est curieux ces huit personnages en ifs taillés, le dernier un peu à la traîne !!!
..... pas très pratique pour guincher !

La gravure en couleur est à l'envers par rapport à la première en noir et blanc .

On raconte que Louis XV était déguisé en if !!!  

Quelque temps après l'ouverture du bal apparaissent huit personnages déguisés en ifs taillés parmi lesquels on devine que se trouve le roi. Il est toutefois impossible de l'identifier parmi ses comparses. Chacun tente de percer l'incognito du souverain mais les huit ifs réagissent tous de même manière, de façon muette, s'inclinant royalement devant les dames3.

C'est lors de ce bal que Louis XV, protégé par son déguisement, manifeste de façon claire son intérêt à Jeanne-Antoinette Poisson, épouse Le Normant d’Étiolles, future marquise de Pompadour, qu'il a croisée peu avant lors d'une chasse en forêt de Sénart2.

Le bal se termine le 26 février 1745 à 8h 30 du matin.

Mémoires du duc de Luynes sur la Cour de Louis XV: 1735-1758



Le bal en musique commença à minuit .
«On n'y entroit que par le salon d'Hercule d'un côté, et de l'autre par la salle des gardes et l'OEil-de-bœuf.
Dans chaque compagnie un se démasquoit à la porte; un huissier écrivoit son nom et le nombre de masques qu'il menoit avec lui. Cet ordre fut observé pendant quelque temps; mais il devint insoutenable par la longueur excessive de temps que l'on étoit obligé d'attendre.

La foule s'augmentoit; elle étoit excessive dans la galerie du côté de la chapelle, encore plus de ce côté-ci dans l'antichambre du Roi; dans l'OEil-de-bœuf il y avoit peut-être cinq ou six cents masques assis par terre. On fut prêt à renverser la porte de glace. Enfin les huissiers furent forcés, et la foule se trouva si grande dans la galerie qu'on y était porté presque d'un bout à l'autre sans mettre pied à terre.
On estime qu'il peut y avoir eu quatorze ou quinze cents masques dans l'appartement en même temps.
On n'avoit pas donné de billets.

Le Roi ne se démasqua point; il étoit masqué en if, lui et sept autres.
M. le Dauphin et Mme la Dauphine étoient en berger et bergère.
M. le duc de Chartres, Mme de Chartres étoient du quadrille de M. le Dauphin, aussi que Mme d'Andlau, M. de Ségur, fils du lieutenant général; je ne sais pas les autres.
La Reine se promena longtemps masquée; M. le Dauphin et Mme la Dauphine n'étoient point encore arrivés, et lorsqu'ils l'eurent jointe elle s'assit avec eux dans la galerie et ôta son masque...

Louis XV était l'un des ifs .