Marie-Christine Josèphe, duchesse de Saxe-Teschen, "Mimi"

L'ambiance familiale n'était vraiment pas au beau fixe. Isabelle et Marie-Christine semblent s'être liguées contre l'aînée Marie-Anne et se moquent des bons tours joués contre elle. De plus Marie-Thérèse a peu de passion pour cette fille dit-on bossue contrairement à François qui essaye de contre-balancer le manque affectif de la mère. Marie-Anne passait pour une affreuse pédante.

Donc un soir au cercle, Marie-Anne et Léopold s'assoient près de leur mère, Isabelle les rejoint. Marie-Anne parle de la pluie et du beau temps. Léopold quitte la compagnie et voilà l'impératrice qui se met à parler à l'oreille d'Isabelle. Et celle-ci de raconter le désappointement de Marie-Anne à Marie-Christine, "j'ai aperçu sa fureur et j'ai ri sous cape" . C'est drôle mais c'est tout de même affreux. C'est surtout l'attitude de la mère qui est odieuse.

Bon, il est 1 heure et demie du matin mais je suis toujours lancée dans ces lettres d'Isabelle de Parme, passionnantes pour connaître la famille de Marie-Antoinette.

A celle dont "Vous savez que la tête me tourne de vous", elle lui donne des conseils pour se mettre le taciturne Joseph dans la poche. Ces conseils démontrent une fois de plus sa remarquable intelligence (et au passage, le mépris qu'elle porte à son mari). Le meilleur moyen est de montrer de l'estime envers Isabelle elle-même. Mais pour ne pas qu'on puisse se douter qu'il y a "plus" entre elles, donner des qualités "que vous faites semblant de me trouver.", tout en lui donnant tort sur des choses sur lesquelles elle se dispute avec Joseph. Isabelle lui promet de lui donner des occasions exprès. Ne montrer aucune amitié particulière aux autres soeurs mais seulement de l'estime, se taire sur leurs défauts (ce qu'elles ne font pas dans leurs lettres). Eviter toute plaisanterie à son égard devant lui et tout faire au contraire pour qu'il entende par hasard des compliments sur lui.
Ces conseils n'ayant pour seul objectif de permettre aux deux femmes d'être plus souvent ensemble si Joseph a de l'amitié pour cette soeur.

A priori, Joseph avait tendance aux "enfantises". En 1761, il a 20 ans. D'après sa femme, il faut le laisser faire au lieu de se fâcher. Il a bonne mine de faire ensuite la morale à Marie-Antoinette.

Maintenant on part dans le lesbianisme avéré. Ça va l'heure est assez tardive.
En même temps, Isabelle fait preuve d'un humour assez décapant.

"Je vous adore, et malgré tous les attraits de votre nouvelle femme de chambre que vous savez être votre rivale, vous l'emportez pourtant toujours. Il faut pourtant que je vous avoue que je vous ai fait bien des infidélités hier au bal. Comment cela aurait-il pu en être autrement ? En entrant, j'aperçois une demoiselle belle comme Vénus : elle en avait les traits, la beauté et les grâces. Grosse comme un petit cochon, une large bouche, un nez qui annonce combien elle a d'esprit, des yeux un peu farouches... à ce portrait, reconnaissez la Turkheim. J'avance, et ma vue est frappée du port majestueux et noble d'un jeune objet. Les rides de son front, les taches de son visage couvertes par un pied de blanc, l'air fier et méchant, grand et maigre. Pourriez-vous méconnaître votre intime amie, votre voisine ? Mon coeur n'a pas résisté à tant d'attraits. Des regards tendres ont fait éclater mes sentiments et j'avoue qu'en ce moment encore, je m'en sens toute émue. Adieu, car je sens que si j'y joignais encore la troisième, que nous avons menée avec nous, je ne serai plus maîtresse de mes transports ; et vous pourriez trop perdre à mes yeux si je pensais à ces chefs-d'oeuvre."


Dans une autre lettre : "Je vous aime pourtant et je suis cependant dans l'inquiétude si je ne devrais pas vous nommer Vénus."[...] et venez vous rendre aux attraits de la seule divinité que je reconnais."

Chou, tu es convaincu maintenant ? Crois-tu vraiment que Vaudreuil et Artois se comparaient mutuellement à Cupidon ou Apollon ?

Bon, j'arrête là, au dodo...

olivia a écrit:

Donc si tu nous dis que ça n'a rien à voir, ça confirme bien qu'Isabelle et Marie-Christine partageaient un amour illicite. Pas reprochable pour autant car à l'époque il est heureux qu'une princesse mariée de force ait pu trouver l'amour. Mais elle ne dépassera pas ses 22 ans.

Ce qui m'étonne le plus dans cette histoire, c'est comment cela n'ait pu sauter aux yeux de leur entourage ? Laissons la petite Madame Antoine qui n'a pas encore 5 ans au début de la liaison mais tous les autres frères et soeurs du même âge ? Les aînées jalousant déjà Marie-Christine ? Joseph fou d'amour pour son épouse qui ne parle de lui dans ses lettres à sa belle-soeur que de manière dédaigneuse ? Quand on pense, le pauvre, qu'il sera choqué par une certaine lettre de sa petite soeur qui ne parle pas pire de son mari et pour des choses beaucoup plus innocentes. Pas si clairvoyant le pauvre Joseph...
Mais surtout, la puissante, la grande, l'omnipotente Marie-Thérèse ?    Et bien elle aussi aimera à la folie (en tout bien tout honneur tout de même) sa belle-fille, tout comme son mari François. Je montrerai plus loin ces sentiments qui ont fait de leur belle-fille leur préférée, bien plus que leurs propres enfants.
Soit elle n'a rien vu, soit elle a laissé faire... Dans les deux cas, je suis extrêmement surprise.

Nous avons parlé d'Isabelle de Bourbon Parme ici :
https://maria-antonia.forumactif.com/t1220-isabelle-de-bourbon-parme
L'auteur de l'excellente biographie dont il était débattu, Ernest Sanger, explique que Marie Thérèse a favorisé cette amitié entre les jeunes filles, parce qu'elle distrayait Marie Christine d'un chagrin qu'elle venait de subir. De plus, l'impératrice adorait sa bru, une jeune personne très intéressante.

Eh bien tu étais en forme Olivia merci

olivia a écrit:

Chou, tu es convaincu maintenant ? Crois-tu vraiment que Vaudreuil et Artois se comparaient mutuellement à Cupidon ou Apollon ?

Admettons
Cependant le "Grosse comme un petit cochon" aurait pu être mal pris tout de même

Ah bah mince alors ! J'avais cherché s'il existait un sujet consacré à cette princesse pour éviter de surcharger celui consacré à Marie-Christine. Je n'en voyais pas. En même temps, j'ai cherché dans Sa famille autrichienne. Je n'ai pas pensé à Autres contemporains.

Chers modérateurs, n'hésitez pas à fusionner.

Ouvrage bien intéressant que tu présentes Pim, je ne le connaissais pas. Il me le faut ! Je n'ai que ses lettres, éditées par Elisabeth Badinter (ce qui expliquerait cette vision féministe) et collection "La bibliothèque d'Evelyne Lever" (en toute simplicité ! ).

Ton analyse me paraît juste. Car il semble, comme l'a dit hier Elise, qu'avant Saxe, elle en est pincée pour un Wurtenberg et que Madame Mère ait dit non.
La complicité plus ou moins assurée de Marie-Thérèse me semble indispensable pour créer une telle relation. Rappelons-nous que les complicités entre archiduchesses étaient fortement surveillées.
Ce qui m'interroge, c'est qu'avant même son arrivée à Vienne, elle ait déjà commencé à écrire ces lettres enflammées à son attention. Alors, peut-être, sachant que Mimi était la préférée, la jeune belle-fille a trouvé judicieux de se mettre bien avec elle pour plaire à sa belle-mère. Ce ne serait pas très étonnant, Isabelle étant d'une grande intelligence et connaisseuse des techniques de cour. Mais peut-être est-elle tombée dans son propre piège...

Chou d'amour a écrit:

Eh bien tu étais en forme Olivia merci

olivia a écrit:

Chou, tu es convaincu maintenant ? Crois-tu vraiment que Vaudreuil et Artois se comparaient mutuellement à Cupidon ou Apollon ?

Admettons
Cependant le "Grosse comme un petit cochon" aurait pu être mal pris tout de même

Elle parle d'une autre femme, pas de Marie-Christine.

Ah ok

Isabelle se compare à Zerbin et sa chère Marie-Christine à Laurette, deux amoureux de comédie.
"Hélas, chère Laurette, était-ce donc là ce que vous me prépariez pour le troisième jour de notre mariage, et pouvez-voir d'un oeil tranquille expirer à vos pieds un amant, un mari, une soeur, une amie, sans flatterie; la plus sincère de toutes celles que vous puissiez avoir ?"
Et la suite de se souhaiter la mort pour échapper à la cruauté de Laurette...

Plus loin, j'apprends qu'Isabelle prenait du tabac !

"Zerbin ne fait que rêver de sa chère Laurette".

Les tensions avec Marie-Anne étaient telles qu'Isabelle conseillait à Marie-Christine de ne jamais se retrouver seule avec sa soeur mais d'avoir la précaution à chaque rencontre de se retrouver au moins chacune avec une femme de chambre afin d'avoir un témoin si besoin d'en référer à l'impératrice. Ambiance sympa !

En allemand : "Oh mon âne, parce que je suis aussi un âne, je t'écris une toute petite missive, bien que j'aurais les plus belles choses à te dire. Tu veux que je t'écrive "baadwaschl" (en argot viennois : gant de toilette ! ), je te suis toute obéissante et t'appellerai ainsi à partir de maintenant, parce que cela te procure tant de joie, adieu. "

Chou d'amour a écrit:

Virile est un bien grand mot tout de même pour évoquer leurs écrits  

C'est à dire ?  ......

Disons que certains de leur échange ne sont pas à mes yeux la virilité même, dans le sens où on peut être amical sans être virile pour autant

olivia a écrit:

Chou, tu es convaincu maintenant ? Crois-tu vraiment que Vaudreuil et Artois se comparaient mutuellement à Cupidon ou Apollon ?

Vraiment pas ! ou alors, ça m'a complètement échappé !

Chou d'amour a écrit:

Disons que certains de leur échange ne sont pas à mes yeux la virilité même, dans le sens où on peut être amical sans être virile pour autant

Je ne te comprends pas ....

Enfin Vaudreuil n'écrivait pas à Artois qu'il était son petit gant de toilette préféré !

Citation :

Chou d'amour a écrit:

Disons que certains de leur échange ne sont pas à mes yeux la virilité même, dans le sens où on peut être amical sans être virile pour autant  

Je ne te comprends pas ....  

Laisse tomber  

Chou d'amour a écrit:

Laisse tomber

T'as raison, ça vaudra mieux !

Isabelle raconte les malheurs de sa grossesse à sa belle-soeur adorée. Elle a auparavant écrit son testament et précisé qu'elle en deviendra folle. Le plus surprenant, c'est qu'elle sait d'avance qu'elle aura une fille.

Je préviens, c'est extrêmement cru ! Âmes sensibles s'abstenir !

"Console-toi, chère Laurette, si le sort cruel t'a fait renverser ton pot de chambre au lit. Ton fidèle Zerbin aurait bientôt éprouvé un malheur bien plus effroyable : pour peu j'aurais chié dans mes culottes. Je pissais tout tranquillement quand tout à coup un vent importun vient avec toute la turbulence donné à Eole, a voulu sortir ; je l'ai cru seul, j'ai voulu lui laisser le passage libre, mais votre nièce qui, j'imagine, a la foire, s'est avisée d'y joindre des excréments. Par bonheur, j'ai pu arrêter à temps. J'ai cru devoir vous mander cette nouvelle comme très intéressante et la Le Noble n'ayant pas voulu se charger de vous la dire, je vous l'écris.
Adieu, je baise votre adorable cul, me gardant bien de vous offir le mien qui est un peu trop foireux."

Eh bien, le moins qu'on puisse dire c'est que les deux archiduchesses étaient extrêmement intimes.

Quel romantisme féminin dit donc!

Chou d'amour a écrit:

Quel romantisme féminin dit donc!

Ah ça brise un mythe !

Clair! Et après on dit que les mecs sont des porcs, des vulgaires et des obsédés...vos ancêtres nous surpassaient de loin en fait

Chou d'amour a écrit:

Clair! Et après on dit que les mecs sont des porcs, des vulgaires et des obsédés...vos ancêtres nous surpassaient de loin en fait

Je ne me sens pas concernée.

Je pense qu'elle faisait de l'humour quand elle dit que la Le Noble, sûrement une femme de chambre n'a pas voulu se charger de la commission. On peut la comprendre.

Mais si ce billet était tombé entre les mains de Marie-Thérèse ? Je n'ose croire qu'elle aurait admis ce genre de propos. Elles avaient beau être les chouchous de la fratrie, il y a des limites. Ou bien la vie à la cour de Vienne était très rabelaisienne ce dont je doute étant donnée la pudibonderie de Marie-Antoinette.

Je ne sais pas comment elle l'aurait pris...

Cette princesse avait vraiment un humour spécial. Digne de la Palatine (je réfléchis si c'est quelque part son ancêtre mais je ne crois pas, elle descend bien de Monsieur frère de Louis XIV mais par une fille d'Henriette). Une ironie mordante, voire du cynisme vis-à-vis de sa situation de pondeuse de futurs petits Habsbourg...

Tout le monde attendant sa délivrance, l'héritier de l'Empire : "C'est au comble de la joie que je vous écris, chère Soeur, pour vous apprendre l'heureux événement qui rend ma félicité parfaite. Après bien des peines, des soins et du travail, je viens de mettre au jour le principe de la gaieté et double avantage encore, les hémorroïdes fluent très joliment, ce qui me fait espérer qu'elles se porteront mieux désormais. Jugez de mon contentement ! Plus de crainte, je vois arriver la journée de demain sans m'en embarrasser. Adieu, je vous baise de toutes mes forces qui quoiqu'épuisées par le grand travail; sont pourtant encore passables."