La vérité sur la comtesse de la Motte de la Pénicière

L’innocence de Rohan transparaît à travers le témoignage de la demoiselle Le Guay d’Oliva. Vous connaissez tous par cœur son témoignage… son mémoire en défense devant le Parlement de Paris est clair, net et précis. Il y a une sorte d’accent de sincérité, qui ne trompe pas le lecteur… à l’inverse du mémoire en défense de La Motte, dans lequel cette dernière est souvent peu précise sur les faits et « discutaille » (avec des raisonnements spécieux du style : il serait inimaginable qu’une descendante d’Henri II se soit rendue coupable d’une escroquerie). Les points clés du mémoire de Le Guay d’Oliva :

1 / Née le 1er septembre 1761, âgée de 23 ans au moment des faits. Elle vit rue du Jour, près de l’Eglise Saint-Eustache, non loin du Palais Royal. Elle n’est rien, ne possède quasiment rien.

2 / Elle est abordée par le sieur de La Motte au mois de juillet 1784. Il tourne autour d’elle, l’osculte, la dévisage pendant plusieurs jours au Palais Royal, puis finit par lui adresser la parole. « J’eus le tort de lui répondre » dit-elle.

3 / Il l’attire chez lui et la présente à Jeanne de La Motte, qui lui déclare « J’ai toute la confiance de la reine ; je suis avec elle comme les deux doigts de la main. Elle vient de m’en donner une nouvelle preuve, en me chargeant de trouver une personne qui puisse faire quelque chose qu’on lui expliquera, lorsqu’il en sera temps. » Elle lui promet 15.000 livres si elle accepte de faire ce qu’on lui demandera, en temps voulu.

4 / L’entrevue du bosquet. Le Guay d’Oliva explique qu’elle ne savait pas qu’on lui faisait jouer le rôle de la reine. Jeanne de La Motte et son mari lui avaient donné pour instruction de remettre une lettre et une rose à « un très grand seigneur » et de lui dire « vous savez ce que cela veut dire ». Le Guay d’Oliva ne savait pas qu’il s’agissait de Rohan. Jeanne de La Motte lui avait fait croire que la reine assisterait à la scène et même, qu’elle s’adresserait à elle. C’est Jeanne de La Motte elle-même qui habille d’Oliva : « Je fus mise en robe blanche de linon moucheté. C’était, autant que je puis me souvenir, une robe à l’enfant, ou une gaule, espèce de vêtement qu’on désigne plus souvent sous le nom de chemise ; et l’on voulu que je fusse coiffée en demi-bonnet. » (On croirait le portait de Marie-Antoinette en gaule, par EVLB.) « Entre onze heures et minuit », dit-elle, d’Oliva sort avec Jeanne de La Motte et son mari. « J'étais couverte d'un mantelet blanc, et j'avais une thérèse sur la tête. » Point capital, d’Oliva indique que « la nuit était sombre, pas le moindre clair de lune, et je ne pouvais rien distinguer que les personnes et les objets qui m’étaient familiers. » Nuit noire et thérèse sur la tête : voilà sans doute ce qui explique pourquoi Rohan ne s’est pas aperçu qu’il n’avait pas affaire à la reine…
D’Oliva raconte la fameuse scène ainsi (ce sont ses propres termes) : « Je présente la rose au grand seigneur inconnu ; et je lui dis, vous savez ce que cela veut dire, ou quelque chose d’à peu près semblable. Je ne puis affirmer s’il la prit, ou s’il la laissa tomber. Pour la lettre, elle resta dans ma poche ; elle fut entièrement oubliée. Dans l’instant même que je venais de parler, la dame de La Motte accourt vers nous, et dit très bas, mais avec précipitation : vite, vite, venez. C’est du moins tout ce que je me rappelle avoir entendu. Je me sépare de l’inconnu, et me retrouve à quelques pas plus loin, avec le sieur de La Motte ; tandis que sa femme et l’inconnu partent ensemble et disparaissent. (…) Le sieur de La Motte me reconduit à l’hôtel garni. Nous restons à causer, en attendant le retour de la dame de La Motte. Elle arrive sur les deux heures après minuit (…) ».
Le témoignage de la demoiselle Le Guay d’Oliva est clair : La Motte, et son mari, ainsi que Rétaux de Villette ont tout manigancé. Elle a participé à une mise en scène destinée à tromper le cardinal. Je me demande ce que Rochefort pense de ce témoignage capital, accablant pour La Motte et disculpant pour Rohan.  Le témoignage de Le Guay d'Oliva est d'autant plus crédible, qu'on ne saurait la soupçonner de s'être entendue avec Rohan pour faire accuser La Motte : en effet, Rohan accuse d'Oliva, dans son mémoire, d'avoir été de mèche avec La Motte !...

Merci, c'est très intéressant.
C'est bien la seule à donner des détails aussi circonstanciés, ce qui lui donne, comme vous le faites remarquer, un accent de sincérité frappant après les témoignages La Motte (le coup de la visite impromptue des joailliers  ).

Que devint la jeune femme par la suite ?

Elle épousa le père du petit enfant qu'elle avait au sein . Et puis ensuite, je ne sais plus ...

Tous les détails sur la vraie-fausse petite baronne d'Oliva, son rôle, sa déposition  ...   :

Second Mémoire pour la Demoiselle Le Guay d'Oliva, fille mineure, ... - Page 54 - Résultats Google Recherche de Livres
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Le Guay d'Oliva, École Sainte-Geneviève - 1786
Le Guay d'Oliva, École Sainte-Geneviève. tarions des lettres de change dont il s'agit , & signées par l'exposante en minorité , nous suppliant de lui accorder nos ...

J'ai l'intention de passer un coup de fil à Evelyne Lever pour lui demander ce qu'elle pense des affirmations de Rochefort...
J'avais tenté lors des échanges avec les merveilleux auteur avant son départ...mais elle était restée injoignable.
Si vous avez des suggestions à me faire comme questions ou points à éclaircir, je vous remercie de m'en faire part

Bien à vous.

Citation :

 Je crois, comme toi, à la sincérité et l'innocence ( si l'on peut dire ... ) d'Oliva .  Elle ignore les tenants et les aboutissants de la mascarade à laquelle elle se prête pour de l'argent .

Ou elle est plus fine que les autres en écrivant sa déposition... ou son avocat plus malin ?

Merci, pour ce témoignage, dont le plus grand mérite est d'être cohérent... ce qui ne signifie pas sincère.

Citation :

A chaque fois que nous avons posé des questions très précises à Rochefort, il a promptement éludé .
Il n'y a pas eu moyen d'obtenir de lui des explications .

Je ne souhaite pas parler à sa place, mais l’histoire du bosquet se déroule avant l’escroquerie du collier.
L’on peut bien entendu supposer qu’elle fait partie d’un tout, ou encore la distinguer (comme le fait par exemple Mme Lever).

Majesté a écrit:

J'ai l'intention de passer un coup de fil à Evelyne Lever pour lui demander ce qu'elle pense des affirmations de Rochefort...
J'avais tenté lors des échanges avec les merveilleux auteur avant son départ...mais elle était restée injoignable.
Si vous avez des suggestions à me faire comme questions ou points à éclaircir, je vous remercie de m'en faire part

Tiens, puisque tu interviens en parlant de Mme Lever, j’ai vu récemment que son livre sur l’affaire du collier venait d’être réédité en format poche, si certains sont intéressés...

Rochefort n’a rien affirmé. Si ?
Si j’ai bien compris (c’est pas sûr ), il revenait sur la révision du procès qui innocentait les La Motte, et sur l’état de fortune du comte à ce moment là, sur les prétentions financières/foncières des uns ou les besoins d’argent des autres etc.
Je vois à peu près d’où les pistes de réflexions démarrent, mais pas où elles vont, à vrai dire.

J'achèterais le livre d'Olivier Blanc . Car ses thèses me passionnent ! 

Si j'ai bien compris son propos hallucinant, il affirme que la Motte ( une dame tout ce qu'il y a de convenable, manipulée par des puissants )  est la malheureuse victime innocente de l'affaire,  .

Mes amis n'ouvlions pas non plus que c'est la femme lamotte qui trouve le nom d'Oliva, valois en verlant...La pauvre mignone, s'est retrouvé exilé de Cour, c'est à dire qu'elle n'avait le droit de vivre qu'a un certain perimetre de la Cour.

Sans aller jusqu'à penser que la Lamotte fût jamais blanche et innocente, j'ai toujours eu l'impression qu'elle avait été utilisée. Par qui et dans quel but exactement, je l'ignore. Mais l'assurance dont elle a fait preuve depuis de début de l'affaire ne s'explique pas autrement, pour moi, que par le sentiment de sa future impunité. En quoi elle a été victime, en effet. Et bien bernée.

Ben oui il n'y a que nous avec tous les témoignages et les preuves que nous apportons pour la trouver non seulement coupable, mais entièrement responsable de l'escroquerie.

Il n'y a que des crédules du genre de Rohan, ou ceux qui sont exités par cette espéce  de femme pour la croire sinon innocente, en tous cas bonne fille.

Citation :

Cependant, c'est cette entrevue du bosquet qui porte Rohan aux nues, lui trouble l'esprit et le porte à avaler toutes les couleuvres par la suite .
C'était préparer le terrain de main de maître pour amener l'Affaire avec un grand A.

Oui, oui, tu la mets dans le « tout » chronologique avec, en point de mire, le dénouement que nous connaissons. Comme je le fais d’ailleurs.
Mais rien n’empêche de distinguer cet épisode du reste.

Absolument !

C'est bien ce que j'ai cru comprendre aussi...

Citation :

Ben oui il n'y a que nous avec tous les témoignages et les preuves que nous apportons pour la trouver non seulement coupable, mais entièrement responsable de l'escroquerie.

Il n'y a que des crédules du genre de Rohan, ou ceux qui sont exités par cette espéce  de femme pour la croire sinon innocente, en tous cas bonne fille.

Bonne fille ? Jamais !

Mais manipulée, sans doute, à mon avis. Il m'a toujours semblé que cette affaire dépassait le cadre d'une banale escroquerie, et plus largement encore les capacités de la femme Lamotte.

Cette affaire était surtout politique... Le début de la fin pour la Reine...    

Citation :

Si j'ai bien compris son propos hallucinant, il affirme que la Motte ( une dame tout ce qu'il y a de convenable, manipulée par des puissants )  est la malheureuse victime innocente de l'affaire,  .

Oui, ça, je l’ai bien compris !  
Rochefort s’appuyait sur la révision de son procès (on lui a répondu : droit + circonstances de cette révision).
What else ?

Osterreich a écrit:

Cette affaire était surtout politique... Le début de la fin pour la Reine...

Je ne pense pas. Elle l’est devenue.

C'est etonnant mais je pense le contraire. pour moi je n'ai pas l'impression qu'elle soit manipulée. L'escroquerie devint plus gros tous les jours un peu plus. C'est comme un mensonge qui grossit et qui finit par t'etouffer. Bref elle est dépassé par l'ampleur de l'evenement et se perd dans ses déclarations.

Il faudrait se reposer la question a qui profite le crime ?

lamotte pour ses faux frais (chateau, vaisselle, argenterie, mobilier, train de vie.
Rohan pour un retour en grâce.
Les comparses pour un profit substanciel

Je ne vois personne d'autre.

Citation :

Osterreich a écrit:

Cette affaire était surtout politique... Le début de la fin pour la Reine...

Je ne pense pas. Elle l’est devenue.

Elle l'était déjà à la base, pour moi. Ce qui n'empêche qu'elle ait pu être récupérée par d'autres, comme c'est toujours le cas des scandales, émeutes, révoltes et révolutions diverses. Ce sont des bras qui les arment en sourdine, et c'en sont d'autres qui en tirent les choux gras. Dans tous les cas, les protagonistes sont baisés.

Oui je te le fait pas dire...    

Citation :

Il faudrait se reposer la question a qui profite le crime ?

lamotte pour ses faux frais (chateau, vaisselle, argenterie, mobilier, train de vie.
Rohan pour un retour en grâce.
Les comparses pour un profit substanciel

Je ne vois personne d'autre.

Mais si. Tous ceux qui avaient intérêt à voir le trône affaibli. Et ils étaient nombreux autant que divers.

Citation :

C'est bien la seule à donner des détails aussi circonstanciés, ce qui lui donne, comme vous le faites remarquer, un accent de sincérité frappant après les témoignages La Motte (le coup de la visite impromptue des joailliers  ).

Que devint la jeune femme par la suite ?

Citation :

Elle épousa le père du petit enfant qu'elle avait au sein . Et puis ensuite, je ne sais plus ...

Ce type était un pamphlétaire patenté puis second couteau de la Terreur, espion des prisons, y dénonçant les "complots". Nous en avons parlé je ne sais plus où dans le Boudoir. Je trouve cela assez extraordinaire pour que ce ne soit pas plus que cela relevé.