Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Mar 13 Mar - 19:27
Benjamin Constant ne l'aurait donc pas inventé .
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Mar 13 Mar - 19:30
Non, et cela me fait plaisir, car j'ai souvent entendu ce mot, mais je serais bien incapable de me souvenir où...
Cela dit, je suis assez ennuyée, car je n'ai pas retrouvé le texte au fameux "prédécessrice"... J'ai très bien pu me tromper d'une lettre en tapant ce mot dans la barre de recherche.
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Mar 13 Mar - 19:32
Louis XV a écrit:
Non, et cela me fait plaisir, car j'ai souvent entendu ce mot,
Vraiment ? ...... moi, jamais !
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Mar 13 Mar - 19:33
Oui, vraiment ! Mais il a pu suffire que je l'entende plusieurs fois de la part d'une seule et même personne pour que j'aie l'impression que c'était un mot courant.
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Mar 13 Mar - 19:38
...... si vous le dites !
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Mar 13 Mar - 19:39
J'ai honte de moi à présent !
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Mar 13 Mar - 19:42
Pourquoi donc ? Vous nous apprenez un mot nouveau . Enfin, à moins que je sois la seule à l'avoir ignoré jusqu'à ce soir !
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Mar 13 Mar - 19:44
Car je déteste faire offense à la langue française !
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Mar 13 Mar - 19:45
Allons, allons, la langue évolue, savez-vous. Il m'arrive même d'inventer des mots...
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Mar 13 Mar - 19:45
C'est tout à votre honneur !
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Sujet: De quelques expressions de la langue française Mar 13 Mar - 19:49
Madame de Chimay a écrit:
Allons, allons, la langue évolue, savez-vous.
Oui, mais certaines réformes de l'Académie Française sont scandaleuses (je pense en particulier à celle de 1990). L'évolution ne doit surtout pas consister en un appauvrissement, ni en une suppression des difficultés.
Oui, oui, je suis un brin réac, je sais...
Madame de Chimay a écrit:
Il m'arrive même d'inventer des mots...
Il faudra un jour que vous nous livriez vos charmants néologismes.
globule Administrateur
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Ven 12 Jan - 8:23
C'est la période des soldes. Mais sont-elles intéressantes ou sont-ils intéressants ? Rhhhhho la question qui embarrasse...
Pas trop mal expliqué dans le Figaro :
«Prix monstres», «-50% sur tous les articles en magasin», «démarques sur tout le rayon»... Les magasins rivalisent de slogans aux couleurs criardes sur leurs vitrines pour appâter le client. Points bleus, rouges, verts... Il y en a toujours pour tous les goûts et à tous les prix! Surtout aujourd'hui, avec l'ouverture des «soldes». Mais d'où vient cet étrange mot? Est-il correct de l'employer au «féminin» ou faut-il, au contraire, préférer le masculin? Le Figaro revient sur son bon usage.
«Soldes». Voilà un mot bien étonnant. Est-ce parce qu'on a pris pour habitude d'acheter des articles a minima par deux en période de rabais, que l'on dit aujourd'hui «je fais les soldes» et non pas «un(e) solde»? Peut-être. Mais ne serait-ce pas surtout pour éviter son accord? «Soldes monstrueuses» ou «soldes monstrueux», les deux formules caracolent sur les devantures de nos magasins. Mais laquelle est correcte?
Une solde ou un solde?
Prenons tout d'abord «une solde». Emprunté à l'italien soldo «salaire du militaire», le mot «soldee», «souldee», «soulde» ainsi écrit, est d'abord employé dans le sens de «paie que l'on donne aux soldats» dès le XIVe siècle, avant de désigner un siècle plus tard, la «solde des gendarmes». Au XVe siècle, la solde donne naissance à la formule «estre à la solde de quelqu'un» soit «être acheté par quelqu'un pour être dévoué à ses intérêts ou à sa cause». L'expression «avoir, tenir quelqu'un à sa solde» est quant à elle postérieure. On la retrouvera par exemple, sous la plume de Benjamin Constant au début du XIXe siècle.
La solde qualifie aujourd'hui «un traitement versé aux militaires ou à certains fonctionnaires civils assimilés», indique le Trésor de la langue française. On la retrouve également dans les formules «solde budgétaire», «congé avec/ sans solde» ou comme synonyme de «salaire», «paye».
Qu'en est-il «d'un solde»? Emprunté à l'italien saldo, déverbal de saldare «solder», le mot «salde» -ainsi orthographié au XVIe siècle, signifie «ce qui reste à payer d'une somme due». Il est intrinsèquement lié à la sphère commerciale. Mais attention son usage n'est pas encore fixé! On le retrouve ainsi employé jusqu'au XVIIIe siècle, au féminin, pour qualifier «une différence entre le crédit et le débit d'un compte». Ce n'est qu'à compter du XIXe siècle, qu'on le retrouvera au masculin, par exemple, sous la plume de Balzac: «[...] je vous remettrai le solde et l'escompte que je calculerai», (Correspondances, 1835).
«Solde» ne deviendra en effet masculin qu'à partir du XIXe siècle. Il revêtira d'abord le sens de «reste d'étoffe, coupon, dans l'argot des marchands» avant de qualifier une «marchandise vendue au rabais», signification qui fait toujours foi aujourd'hui. De nos jours, «un solde» peut également s'employer pour parler de «solde migratoire» ou de «solde des créances et dettes» en comptabilité publique.
Le mot exact pour parler de «soldes» est donc bien «un solde»! Pour être correct, on écrira: «Soldes monstrueux». http://www.lefigaro.fr/langue-francaise/actu-des-mots/2018/01/10/37002-20180110ARTFIG00097-des-soldes-monstrueuses-c-est-monstrueux.php
Voilà ! Comme ça on aura l'air moins c...
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de La Reinta
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Dim 4 Fév - 15:13
Deux grosses erreurs qui viennent du XVIIIe !!!!!
L’imprimeur du dictionnaire de l’Académie française, au début du XVIIIe siècle, n’avait pas fait fondre suffisamment de lettres "è"… Une faute professionnelle qui reste dans nos dictionnaires actuels, même si depuis 1990 on peut aussi écrire évènement.
grave !!!
Dans le genre erreurs académiques, il y a aussi le fameux nénuphar. Il s’est écrit avec un "f" depuis le XVIIIe siècle, et en 1935, l’Académie lui a attribué un "ph" pour lui rendre sa racine grecque. Sauf que nénuphar vient de l’arabe, donc aurait toujours dû être écrit avec un "f". Là encore, les deux graphies sont permises aujourd’hui.
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madame antoine
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Jeu 1 Mar - 8:35
Bien chers Amis du Boudoir de Marie-Antoinette,
Nous nous intéresserons à une expression bien connue actuellement mais au parcours difficile à retracer, la "lune de miel".
Selon la légende, la locution «honey moon» proviendrait d'une tradition babylonienne. À l'époque, il aurait en effet été de coutume pour le père de la mariée de donner au jeune époux de la bière au miel durant le premier mois de leur union. La boisson était censée augmenter les chances de fertilité du couple. Le mot «honey» dérivait ainsi de la bière au miel et le terme «moon» du mois qui suivait le jour du mariage, basé sur le calendrier lunaire. Une anecdote sympathique, certes, mais qui fut démontée par les lexicographes anglais dès le XVIe siècle.
Bien qu'attestée au XVIIIe siècle en France, dans le sens «symbole traditionnel de l'amour», la locution apparaît en effet pour la première fois chez nos voisins Anglais, dans un ouvrage au titre fleuve de John Heywood paru en 1546. L'auteur l'utilise sous la forme «hony moone», pour signifier un sentiment de gaieté. Une jolie définition certes, mais incomplète pour le lexicographe anglais Richard Huloet. Il précisera son emploi en 1552 et expliquera que cette «hony mone» caractérise en réalité un amour qui est voué à ne pas durer. Une définition on ne peut plus cynique de l'amour que confirmera le lexicologue Thomas Blount en 1656.
Cette conception négative de la locution se retrouvera également en politique à la fin du XVIe siècle. Elle décrivait alors une courte période de sympathie entre des politiciens avant que leur relation ne tourne au vinaigre...
Ce n'est que deux siècles plus tard que la formule prendra (enfin) un nouveau tournant pour désigner un sentiment amoureux. Et sans sarcasme! Ce, bien que le Trésor de la langue française cite Voltaire, maître de l'ironie, comme premier auteur français de la locution en 1748... «La lune de miel», transcription littérale de «honey moon», désigne «le premier mois de cette union, ce mois précieux que les Anglais nomment énergiquement the honeymoon».
Il faudra encore attendre un siècle pour que l'expression intègre l'idée d'un voyage, indique le magazine anglophone Country Living. Au XIXe siècle, en Angleterre, les jeunes mariés partaient en «lune de miel» pour aller à la rencontre de toutes les personnes qui n'avaient pas pu assister à leur mariage.
La conception de «voyage de noces» est donc très récente. Au XIXe siècle encore, note le Trésor de la langue française, la «lune de miel» signifiait en France «mois qui suit le mariage; premiers temps de vie commune où règnent l'entente, le bonheur dans le couple». Une définition qui induisait alors une future rupture entre les mariés... Ou comme le notait si bien Oscar Wilde: «Le mariage est la cause principale de divorce.» http://www.lefigaro.fr/langue-francaise/
Bien à vous
madame antoine
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Chakton
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Sam 17 Mar - 10:48
Mais d'où ça vient d'abord, "atmosphère" ?
Composé du grec atmos, «vapeur humide» et sphaira, «sphère céleste», l'atmosphère est, selon Furetière au XVIIe siècle, «la partie de l'air qui est chargée de vapeurs, ou de nuages, et qui n'a pas la pureté de la région éthérée.» Passée dans les usages au XVIIIe siècle l'atmosphère devient l'air que respire une personne, puis au sens figuré «ce qui environne quelqu'un ou quelque chose». D'où sa synonymie avec le mot «ambiance».
Ce dernier terme, emprunté au latin ambiens, de ambire «aller autour», décrit la qualité d'un milieu ambiant, ce qui «environne une personne ou une chose», indique le CNRTL. Ainsi, si vous choisissiez d'éclairer vos appartements avec des bougies d'ambiance, vous créerez un climat chaleureux, avec une atmosphère chaude et douce. Bonne ambiance assurée! http://www.lefigaro.fr/langue-francaise/
A bon entendeur !
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Lun 16 Avr - 13:12
Hello, le Boudoir de Marie-Antoinette ! Vous allez bien, les p'tits loups ?
Ce dont on va parler, ce n'est pas à proprement parler une expression, mais une évolution de langage. Autrefois, "vide" s'écrivait "vuide" et il y avait un flottement entre le v et le u. Héritage du latin, vraisemblablement, où il n'existait qu'une lettre qui s'écrivait u en minuscule, V en majuscule, et se prononçait "w".
Mais revenons au "uif" du sujet...
D'où vient le verbe «évacuer», à l'origine du substantif «évacuation»? Question résolue d'emblée dans la première édition du Dictionnaire de l'Académie française, publiée en 1694. En consultant en effet l'article à son ordre alphabétique, dans le premier tome, nous voilà immédiatement propulsés dans le second: «Évacuation, Évacuer. Voyez Vuider». Rappelons que la première édition du Dictionnaire de l'Académie offrait les mots dans un ordre savamment étudié ménageant à la fois l'ordre alphabétique et l'ordre sémantique auquel correspondent les familles de mots.
C'est donc alors sous la bannière de l'adjectif «vuide» que se retrouvent tous les mots de la même famille dont «évacuation», non sans avoir, là également, introduit l'article consacré au mot «vuide» par une remarque d'ordre phonétique: «On prononce peu le second u».
Quel second «u»? Il faut alors se souvenir que jusqu'au XVIIIe siècle, le «v» et le «u» s'écrivaient semblablement «v», ce qui compliquait singulièrement la recherche des mots dans l'ordre alphabétique. Ainsi fallait-il par exemple chercher «vocable» derrière le mot «université», et «ulcère» juste derrière le mot «vivres»…
De même famille: vuidange
Vuider, vuidange, tels sont les premiers mots cités de la famille de vuider. Puis vient survuider c'est-à-dire ôter le trop-plein, un verbe qui n'existe plus. Suit évuider, et enfin évacuer et évacuation. En fait, c'est du latin vacuus, vide, inoccupé, précédé du préfixe ex, signifiant «en dehors», que vient le verbe «evacuere», faire le vide. Dès l'Antiquité, le verbe appartenait déjà au domaine médical et c'est ainsi qu'il passera en langue française au XIIIe siècle, suivi au début du XIVe siècle par le nom, évacuation.
Tout naturellement, la première définition qui en est donnée dans un dictionnaire, en l'occurrence le Dictionnaire françois de Richelet publié en 1680, relève de la Médecine: «C'est chasser & faire sortir du corps les humeurs qui nuisent» est-il clairement dit. Avec un exemple que Molière dans Le malade imaginaire n'aurait pas repoussé: «Il s'est fait une grande évacuation d'humeurs.»
De son côté l'Académie en fait même un nom terriblement concret avec cet exemple éloquent: «Le Médecin en voyant les évacuations jugea que le malade estoit beaucoup mieux.» Tant mieux! Quant au verbe «évacuer», pudiquement, Richelet choisit justement un extrait de Molière: «Évacuer la bile».
Extension…
Certes, en 1690, dans son Dictionnaire universel, Furetière signale prioritairement le sens médical, avec pour exemples un peu crus le fait selon les croyances de l'époque que «Les petites évacuations sont des bénéfices de ventre» et que «dans l'apoplexie il faut faire de grandes évacuations par la saignée». Il n'oublie cependant en rien l'extension nouvelle du mot dans le domaine militaire.
«En termes de Guerre, précise-t-il, «Faire l'évacuation d'une place, c'est en faire sortir la garnison d'un prince pour laisser la place libre à un autre.» Ainsi, à la fin du XVIIe siècle, est déjà bien installé le sens correspondant au fait d'évacuer un lieu, un pays, des personnes qui l'occupent. À la fin du XVIIIe siècle, ce sera aussi déjà, presque familièrement, «quitter un lieu».
Des blessés
C'est surtout au XIXe que «l'évacuation des blessés, des malades», notamment en temps de guerre ou au cours d'une catastrophe va s'imposer. Enfin, vers 1870, apparaît aussi l'acception consacrée aux eaux usées, aux égouts, au moment où d'indéniables progrès sont à noter dans le domaine.
Enfin, plus récemment, nos dictionnaires et notamment le Trésor de la langue française, achevé en 1994, enregistrent le sens moderne, qu'on retrouve pour Notre-Dame-des-Landes: «Action de faire partir, sortie d'un lieu par ordre de l'autorité de la force publique.» Et l'on trouverait sans peine dans d'autres dictionnaires quelques exemples relevant du contexte judiciaire: «Le président fit évacuer la salle.»
L'évacuation littéraire…
Les usages du mot «évacuation» en littérature restent pour le moins rares. Peut-être même inexistants s'agissant de poésie. On doit cependant à Paul Morand une remarque qui y fait allusion en 1944 dans Excursions immobiles: «La littérature n'est pas une évacuation déréglée des idées, une pêche miraculeuse au hasard du dictionnaire», affirme-t-il. Assurément! Mais si l'on cherche à donner au mot une tonalité légère, c'est très difficile, à moins de recourir ici aux anagrammes. Quelle est l'anagramme du verbe «évacuer»? Cerveau. À ne surtout pas évacuer! http://www.lefigaro.fr/langue-francaise/
Génial, non ?
J'adore ces rubriques linguistiques du Figaro !
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globule Administrateur
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Mer 25 Avr - 7:54
Good morning Boudoir de Marie-Antoinette ! Wie geht's euch ? Ce matin, discussion autour d'une expression qui, à elle seule, serait bien tout le XVIIIe, si vous voyez ce que je veux dire. Il s'agit du mot baroque. Entre nous, tout un poème.
La chronique de Logophilus sur le mot "baroque" dans L'Express du 1er avril 1968. (Arcives de L'EXPRESS)
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cassos
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Mer 25 Avr - 9:27
Bien, ce sujet sur le langage. Je plussoie !
madame antoine
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Dim 29 Avr - 10:04
Voici un terme familier aux étudiants, mais dont le sens profond n'est pas si évident.
Pourquoi parle-t-on «d'université» ?
1571: «Université lettrée, studieuse, docte, parisienne, fréquente, noble, disciplinaire, commune, fameuse, académique, rectorale, populeuse, célèbre». Tel est le choix d'épithètes proposées au XVIe siècle par Maurice De La Porte pour le mot «université». Et dans un dictionnaire de 2005? «Universités anglaises, françaises, américaines, brésiliennes, soviétiques, chinoises», mais aussi «anciennes, historiques, célèbres, nouvelles.» Les épithètes ont changé, mais l'Université demeure. Alors d'où vient ce mot si bien ancré dans notre langue?
Universelle?
Laissons répondre tout d'abord Maurice De La Porte qui commence par donner une définition de ce que représente selon lui, en 1571, une université, pour ensuite proposer son interprétation sur l'origine du mot. «Par ce mot, déclare-t-il à propos de l'université, est entendu le lieu où se fait l'exercice des bonnes lettres» et où l'on peut «même acquérir degré aux basses & supérieures facultés.» Les lettres sens large y sont en effet enseignées, mais y sont aussi obtenus les «degrés», c'est-à-dire les diplômes propres aux quatre facultés parisiennes de l'époque, celle des Arts - il faut comprendre ici ce qui concerne les métiers -, et les facultés de médecine, de jurisprudence et de théologie.
Quelle étymologie croit-il pertinente? L'Université est «ainsi dite» précise-t-il, «ou parce qu'il y a gens doctes aux disciplines universelles, ou pour autant que de toutes parts on y abonde», on y vient. L'université relevait en effet sous la Renaissance de cette universalité appelée des vœux des humanistes. Cependant, même si ce concept reste cher à l'Université, ce n'en est pas l'origine.
Tous en un
En réalité, l'université n'a en rien été désignée parce qu'on y enseignerait des «disciplines universelles», même si pareille origine ne manquerait pas de charme. En revanche, on ne se trompe pas si on repère dans le mot université le nombre un, et si l'on souligne que l'Université est «une», c'est-à-dire un ensemble formant un tout. Elle tire en effet son nom du latin classique universitas, dérivé direct de universus, signifiant «tout entier, considéré dans son ensemble». On y repère en effet uni, un, et versus que vient de vertere, tourner, à la manière d'un univers clos.
En latin médiéval, l'université désigna de fait une corporation, une communauté, mais aussi toute collectivité religieuse, politique, sociale ou professionnelle. Ainsi, au XIIe et XIIIe siècles, l'assemblée de chanoines réunis pour écouter la lecture d'un chapitre pouvait être présentée comme une université, tout comme l'ensemble des habitants d'une ville, ou une société d'artisans
L'université ou l'on enseigne
Quand en définitive l'Université a-t-elle pris le sens correspondant à celui que nous lui connaissons et correspondant à l'ensemble des établissements d'enseignement supérieur? S'agissant de l'enseignement en général, au-delà de l'enseignement supérieur, presque en même temps, puisqu'existait la formule «universitas magistrorum et scolarium», corporation de maîtres et d'étudiants, attestée dans une lettre du pape Innocent III, en 1208.
En fait, le mot «Université» résulte d'une abréviation de cette longue formule latine. Et parmi les différentes Universités françaises, ce fut celle de la Sorbonne fondée par Robert de Sorbon en 1253 qui fut la plus célèbre. De fait, cette notoriété ne se démentira pas au XVIIIe siècle, comme en témoigne Montesquieu, qui peut sans hésiter dans les Lettres persanes affirmer que «L'université de Paris est la fille aînée des rois de France» et qu'elle est «très-aimée, car elle a plus de neuf cents ans».
On appréciera cependant la chute, sous la forme d'un mot d'esprit: «aussi rêve-t-elle quelquefois»… Lieu de rêverie et de contestation, c'est- assez fréquent pour l'Université à travers siècles! Mais de fait, le sens du mot Université allait encore évoluer et au XIXe, elle aurait encore un autre sens que celui d'aujourd'hui.
Université: consulter Littré…
On se trompe en effet parfois quant au sens du mot Université au XIXe siècle. Il faut ici se souvenir de la définition de Littré dans son dictionnaire achevé en 1873: aujourd'hui, déclare-t-il, l'université désigne le «corps enseignant unique pour toute la France, placé sous la direction du ministre de l'Instruction publique.» Et de rappeler que ladite université «a été fondée par décret de Napoléon Ier, du 17 mars 1808 ; elle porta d'abord le nom d'université impériale, puis celui d'université de France ; elle comprend: 1° Les facultés ; 2° les lycées ou collèges de l'État ; 3° les collèges communaux ; 4° les écoles primaires ; et tout cela sous la direction d'une administration centrale.»
En somme, on reprenait ici l'idée d'un ensemble qui regroupera ce qu'au XXe siècle on appelle l'Éducation nationale, pendant que l'Université s'assimila spécifiquement à tout établissement relevant de l'enseignement supérieur.
L'alma mater
C'est à la fin du XIXe qu'une formule fit rage au point même d'entrer dans le Dictionnaire des idées reçues de Flaubert: si l'on parle d'université, il faut tout de suite ajouter, déclare-t-il, qu'elle est notre alma mater, c'est-à-dire la mère nourricière! Université «populeuse» disait Maurice De La Porte. Il sous-entendait «féconde», féconde pour l'avenir. C'est ce que tout le monde souhaite.
Par Jean Pruvost http://www.lefigaro.fr/langue-francaise/
madame antoine
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Mer 1 Aoû - 18:04
Quel point commun entre des noms aussi hétéroclites que bougie, estragon et guitare ? Tous viennent de l'arabe, comme plus de quatre cents mots de la langue française. Sauriez-vous les reconnaître ?
Si vous prenez un café sans sucre ou un jus d'orange et que vous achetez vos épinards, aubergines et abricots au magasin d'en face, vêtue d'une jupe en coton et d'un gilet camaïeu, vous avez déjà utilisé plus de dix mots arabes. Sur les plus de quatre cents que possède le français, - ce qui fait de l'arabe la troisième source d'emprunts de notre langue (devancée par l'anglais et l'italien) -, une centaine est à usage régulier. Si on le savait pour sarouel, babouche et hammam, et qu'on s'en doutait pour charabia, toubib et azimut, on le découvre pour café, sucre, orange, épinard, aubergine, abricot, magasin, jupe, coton, gilet, camaïeu… et bien d'autres.
Débarqués en Europe lors de la conquête musulmane de la péninsule ibérique, ces mots se sont ensuite propagés grâce aux échanges commerciaux et universitaires, c'est pourquoi la majorité d'entre eux appartient au domaine du textile et de la gastronomie. Du VIIIe au XVe siècles, ils ont sillonné l'Espagne, l'Italie, la France, laissant derrière eux des traces de leur passage que les étymologistes se plaisent à retracer. Comme Jean Pruvost nous l'explique dans Nos ancêtres les Arabes, Ce que notre langue leur doit, (Lattès) auquel cet article doit beaucoup, le français possède deux fois plus de mots d'origine arabe que de mots d'origine gauloise! http://www.lefigaro.fr/langue-francaise/
Perso, je connais algèbre, alcool, khôl, clebs, flouz, toubib... et halouf... mais qui n'est pas passé dans la langue française.
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Sam 22 Sep - 12:42
Voici quelques explications sur l'orthographe difficilement traçable de cinq mots de notre belle langue française.
● Nénuphar «Nénufar avec un f, Ah les phumiers!», s'exclame un des personnages du caricaturiste Siné en 1990. Cette année-là, une grande réforme de l'orthographe fait trembler le bon usage. Le français est sorti de ses gonds. Soudain, il devient correct d'ajouter des accents pour mieux coller l'écrit à l'oral et de supprimer des voyelles, des doubles consonnes et des traits d'union. Cette simplification est vue, pour certains, comme une amputation, une façon de couper les mots de leur sens et de leur étymologie, mais elle est aussi perçue, pour d'autres, comme un moyen de mettre en lumière les mouvements et évolutions de la langue de Molière. C'est le cas de «nénuphar».
Le mot s'écrit originellement avec un «f» et non un «ph». Emprunté au sanskrit niltpala «lotus bleu», le nénuphar est passé dans la langue arabe sous la forme «ninufar» avant d'arriver en français écrit «neuphar», «nénufar», au XIIIe siècle. Son orthographe a toutefois fait l'objet de nombreux débats à travers les époques. Le Littré rappelle ainsi que l'on a longtemps pensé que le mot devait dériver du latin nymphæa, lui-même issu du grec numphaia, et ainsi s'écrire «nénuphar». Quoiqu'inexacte, cette écriture demeure encore dans les usages.
● Évènement C‘est Google qui le dit! Il y a aujourd'hui davantage «d'événements» que «d'évènements» qui se produisent en France. Mais d'où vient cette curieuse nuance orthographique? Faut-il préférer l'accent grave ou aigu? Formé sur le latin classique evenire «avoir une issue, un résultat», «arriver, se produire», sur le modèle de «avènement», le mot débarque en France au XVe siècle. Il s‘écrit alors «événement» dans le Dictionnaire du Moyen Français. Y compris dans la Quatrième édition du Dictionnaire de l'Académie française. Ce, jusqu'à sa Neuvième édition, où l'on peut lire «évènement». Alors pourquoi ce changement d'accent?
À cause de la phonétique! On prononce le son [è] plutôt que [é] devant une syllabe contenant un «e» muet. C'est le cas dans le mot «évén(e)ment». Ainsi, si l'usage oral a très tôt prononcé «événement» sous la forme «évènement», il aura fallu attendre plusieurs siècles, et notamment la réforme orthographique de 1990, avant de pouvoir vraiment lire les deux écritures «événement» et «évènement».
À noter que l'Académie française fut la première, parmi les dictionnaires, à accepter l'orthographe «évènement». On notait ainsi dès 1935, à l'article Sabler, dans la Huitième édition de son Dictionnaire: «célébrer un évènement en buvant du champagne».
● Rencard Ou «rencard», «rancart» et «rancard». L'orthographe de ce mot est aussi obscure que ses origines. Peut-être le terme s'est-il formé sur une altération du mot «rencontre», note Le Trésor de la langue française. Mais peut-être le «rencard» s'est-il plutôt construit autour du déverbal de rencarrer «rentrer chez soi ou dans un lieu sûr après un coup» lui-même dérivé de «encarrer», «carre», c'est-à-dire le «coin». Rien n'est certain. D'autant que le rencard a longtemps échangé son orthographe avec son homophone argotique «rancart» qui, lui, qualifie un «renseignement confidentiel»... Aujourd'hui encore, les écritures alternent.
Le Petit Robert emploie à la fois «rencard» et «rancard» pour désigner le rendez-vous galant tandis que Le Petit Larousse propose «rancart», «rancard» et «rencard». Inversement, si les thésaurus omettent l'écriture «rencart», le Trésor de la langue française, lui, accepte cette écriture dans la locution populaire «avoir un rencart». Conclusion? Chacune des formules est correcte. L'essentiel étant de ne pas poser de lapin à son rendez-vous.
● Céleri C'est un petit mot qui a fait un long voyage pour arriver jusque dans nos cantines. Emprunté au lombard «séleri» (correspondant à la forme toscane sèdano), du bas latin selinon, lui-même issu du grec selinon «persil», le céleri débarque en France, au XVe siècle, sous la forme «scellerin». De «scelereau», il devient «celeris» et «sceleri» (XVIIe siècle) puis «céleri-rave» au XVIIIe siècle. L'accent aigu était ainsi né.
Toutefois, en raison du «e» muet contenu dans le mot céleri -on dit «cèlri» et non «cèleri»- et des rectifications orthographiques de 1990, il est désormais possible d'écrire «cèleri».
● Oignon Comme son voisin le «céleri», l'oignon a subi moult altérations au fil du temps. Du latin unionem «sorte d'oignon qui n'a pas de caïeux» de unus «un» (parce que l'oignon a un tubercule unique), le mot s'écrit d'abord sous la forme unniun (XIIe siècle), indique Le Trésor de la langue française. On le retrouve tour à tour écrit «oinun», «oingnun», «ognon». Ce, jusqu'au XVIe siècle, où l'on peut enfin lire «oignon». Toutefois, le mot continuera de fluctuer après cette époque. Le Trésor de la langue française note succinctement: «1718-1762: oignon; 1798: ognon; 1835, 1878: oignon, ognon; 1935: oignon».
De nos jours l'orthographe admise du bulbe est «oignon». Mais pas seulement. La réforme de l'orthographe de 1990 se calquant sur les anciennes graphies du mot oignon et les diverses velléités de certains grammairiens pour faire sauter le «i» de l'oignon, propose l'écriture «ognon». Une graphie peu usitée. Peut-être en raison de l'impression de barbarisme qu'elle suscite... http://www.lefigaro.fr/langue-francaise/
madame antoine
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Airin
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Jeu 17 Jan - 7:31
Quand ce que l'on croit actuel ne l'est pas tant qu'on ne le croit.
Nous les prononçons avec un naturel déconcertant. Ce sont des mots de tous les jours, un vocabulaire familier qui s'immisce dans nos conversations. Et pourtant, nous sommes loin de soupçonner leur origine pour le moins étonnante. Florilège.
● Clebs
Qui sait aujourd'hui que ce mot familier vient de l'arabe? Comme l'écrit le lexicologue Jean Pruvost dans son ouvrage Nos ancêtres les Arabes (JC Lattès), le mot «kilab» désigne «les chiens en arabe classique» et «kläb», en arabe maghrébin. C'est en 1863 que «cleb» est attesté en France. L'ajout du «s» final apparaît au siècle suivant, en 1920. Puis, au cours des années 1930, le terme «clébard», désormais doté d'un suffixe argotique, «entre sans complexe dans nos dictionnaires d'argot».
● Swag
Plus récent, cet adjectif familier est surtout utilisé par les plus jeunes pour décrire quelqu'un qui a du style. Quelqu'un de, pardon my english, «cool» par son style vestimentaire, son attitude, ses goûts... Quelle est notre surprise lorsqu'on apprend que le mot vient de l'anglais to swagger qui signifie «se pavaner, faire le fanfaron»! Le terme figure même en 1600 dans Le songe d'une nuit d'été de William Shakespeare.
● S'enjailler
Le verbe français qui se rapproche le plus de ce terme argotique est «enjoailler» qui signifie «parer, enrichir quelqu'un de joyeux» ou «décorer quelque chose de joyaux», précise Le Trésor de la langue française. Rien à voir, pourtant, avec «s'enjailler» qui, dans le langage des jeunes, est utilisé à la place de «faire la fête». Selon Le Petit Robert, le mot apparaît vers 2000 en Côte d'Ivoire et est une «déformation de l'anglais to enjoy, ‘‘s'amuser'', anglo-normand enjoi(e)r, de joie».
● Toubib
Nous tirons ce terme de l'arabe classique tabib ou tbib en arabe d'Algérie, lit-on dans les colonnes du Petit Robert, qui signifie «médecin». Mais comme le précise Jean Pruvost, ce n'est qu'en 1863 que «toubib, issu de l'argot militaire, avec cette perception qui restera encore forte jusqu'à la Première Guerre mondiale», entre en langue française. En effet, «c'est l'argot militaire et la colonisation qui détermineront l'orthographe et la prononciation retenues, toubib, en tant que médecin militaire tout d'abord». À partir des années 1920, le «toubib» désigne plus largement un «médecin de manière familière». Le Petit Larousse fait entrer ce mot dans son dictionnaire dans le millésime 1845 «sans commentaire autre que celui du registre argotique: ‘‘Toubib, n.m Arg. Médecin''».
● Thug
Il désigne le petit voyou, le rebelle, le «bad boy». Le mot, orthographié thag, existe depuis le XVIIIe siècle, apprend-on dans l'ouvrage Les mots du bitume (Le Robert) d'Aurore Vincenti. Il caractérise le «menteur, malfrat» et est très certainement issu du sanskit sthagayati, «dissimuler». Le «thug» est alors, en Inde, «une secte active de voleurs et d'assassins qui tuaient leurs victimes en les étranglant». Puis, au XIXe siècle, le romancier anglais Philip Meadows Taylor a recours à ce terme d'argot dans son livre Les mémoires d'un thug.
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madame antoine
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Lun 25 Mar - 8:14
Bien chers Amis du Boudoir de Marie-Antoinette,
Voici quelques expressions couramment utilisées dont le sens s'est généralement perdu.
● Tirer à hue et à dia
L’expression, quelque peu vieillie, s’emploie «quand on progresse de manière chaotique». Au sens figuré, la formule veut dire «agir de façon contradictoire et désordonnée». Mais comment expliquer le sens de ces «hue» et «dia»? Pour le premier, il nous faut remonter jusqu’au XIIe siècle. À l’origine, cette onomatopée, hu, sert à «effrayer ou à marquer le dédain». On retrouve cet aspect dans le mot «huées». Puis, «hue» a fini par être utilisé par les charretiers pour indiquer aux chevaux qu’il faut tourner à droite. Ainsi, «l’on devine que si hue pousse vers la droite, dia doit orienter vers la gauche». Ainsi, la locution «à hue et à dia indique forcément un tiraillement entre deux côtés opposés».
● À tire-larigot
La formule indique l’idée d’«abondance». Mais d’où vient cette étrange formule? Elle est d’autant plus mystérieuse que l’étymologie du terme «larigot» est inconnue. Apparu au XVe siècle, écrit «harigot», «arigot», il désigne une «petite flûte rustique». La consonne «l» s’est ajoutée à la suite d’une agglutination de l’article. Attestée au XVIe siècle, l’expression «à tire-larigot» signifie alors «‘‘beaucoup, à grands traits’’ en parlant de boisson». Mais alors, quel rapport avec la «flûte»? «La métaphore n’est pas isolée dans la langue populaire: le verbe flûter a ainsi signifié ‘‘boire’’ et l’on utilise toujours siffler avec le sens de ‘‘boire d’un trait’’.»
● Mener une vie de patachon
L’expression apparaît au XIXe siècle et signifie depuis «mener une vie dissolue et instable». Le mot «patache» vient à l’origine de l’espagnol pataje, «bateau de guerre léger», lui-même issu de l’arabe batas,«bateau à deux mâts». Au XVIIIe siècle, «la patache désigne différents navires légers» avant de signifier, à la fin de ce même siècle, «une petite diligence à deux roues, peu confortable et dans laquelle on voyage à moindre coût». Et son conducteur? Le «patachon, dont la vie, entre allées et venues à toute heure sur les routes, passait pour être mouvementée, agitée, dissipée».
● Fier comme un pou
On a plutôt l’habitude, c’est vrai, de dire «laid comme un pou». Comment expliquer que ce petit être fourmillant finisse par représenter une aussi noble posture? Selon Julien Soulié, «l’expression repose sur une parfaite homonymie fortuite et le contresens qui s’est ensuivi - a fortiori dans son développement être fier comme un pou sur l’épaule d’un prêtre». Notons ceci: le mot «pou» est une forme dialectale de l’ancien français pouil, poul qui désignait un jeune coq. Ces derniers venaient du latin pullus «qui renvoyait au petit d’un animal et, par spécialisation, au poulet (de même étymologie)». L’expression était donc, à l’origine, celle-ci: «Fier comme un coq».
● Chercher des noises
Faut-il voir la trace de l’anglais dans le mot «noise», signifiant «bruit»? Oui. Mais allons plus loin. L’ancien français noise, apparu au XIe siècle, signifiait alors «tumulte». D’autres étymologistes supposent que le terme vient du latin noxia, «faute, crime». Au XIIe siècle, la noise fut synonyme de «querelle, dispute». Dès l’apparition du français classique, le mot ne survit pas... sauf dans l’expression «chercher noise», puis «chercher noises à quelqu’un» et même, «chercher noises pour noisettes (chercher querelle pour un rien» qui apparaît au XVIIe siècle. http://www.lefigaro.fr/langue-francaise
Bien à vous
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pimprenelle
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Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Lun 22 Avr - 12:01
Il ne sera pas question d'expressions à proprement parler, mais plutôt de ce qui, avec l'écriture de nos smarts et autres Iphones, tend furieusement à disparaître...
... non, pas les accents, encore que ceux-là aussi se fassent la malle.
Non, ce qui balance la phrase, rythme le discours, termine et hiérarchise les idées... ce qui en un mot reste indispensable !
la ponctuation
● Le point, signe de l’accomplissement
Pour vous convaincre de l’importance d’un simple point, voici une anecdote rapportée par Rémi d’Auxerre et relayée dans Conseils pour l’édition des textes médiévaux de Françoise Vieillard: «Au IXe siècle, lors de la conjuration contre Charlemagne, on demanda aux félons de s’engager par écrit. Lorsque l’affaire fut découverte, les billets furent produits pour confondre les traîtres». Voici l’un d’eux: Etsi omnes recesserint, ego autem non hic stabo, «Si tout le monde quitte le roi, moi non plus je ne resterai pas à ses côtés». Mais voilà, l’auteur se défendit et plaida une mauvaise ponctuation de son texte. Il fallait lire: Etsi omnes recesserint, ego autem non. Hic stabo, «Si tout le monde quitte le roi, moi pas. Je resterai à ses côtés».
Du latin punctum, formé sur le verbe pungere, «piquer avec le stylet», les premiers points apparaissent au IIe siècle. «On attribue ainsi à Aristophane de Byzance l’invention du point parfait (point d’en haut), du point médian (au milieu) et du point d’en bas.» Cela peut paraître paradoxal, mais le point d’en bas, le comma à l’époque, marquait en réalité une poncuation faible et signalait une pensée incomplète. En effet, jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, avant que ce petit rond ne soit la marque d’une vraie fin, il «séparait différents éléments, en marquant une pause, une suspension».
● Le très hybride point-virgule
Avant l’apparition des émojis, il était encore présent dans les «smileys» et dessinait un clin d’œil. Mais aujourd’hui, ce signe est en voie de disparition. Reconnaissons tout de même que son utilisation n’est pas des plus évidentes. Aussi, pour comprendre ce symbole hybride, revenons sur son histoire. Il apparaît au XIe siècle et est alors appelé periodus. Il«servait à marquer la fin d’une période». Son statut évolue dès la fin XVe siècle pour devenir un élément de ponctuation semi-forte.
Trop délicat, évidemment subtil, nous n’osons jamais vraiment l’inscrire. L’écrivain Pierre Michon le compare à une «colonne». Julien Rault l’explique ainsi: «Le signe permet de mettre sur le même plan, au sens géométrique du terme, des segments dont la dépendance est logique». Une logique non pas syntaxique mais symétrique, énumérative. Prenons cet exemple: «Il vit une ville ; il vit les chevilles des femmes d’officiers quand elles montent en voiture ; il entendit de jeunes hommes qui effleuraient de leurs moustaches l’oreille de belles créatures faites de rires et de soi» (Vies minuscules, Pierre Michon).
En littérature, il est également possible d’avoir recours au point-virgule afin d’insister sur «des effets de concomitance ou de successivité des actions» et même, des éléments de description ou un souvenir. Ainsi Michel Leiris y a-t-il recours dans cet extrait de L’Âge d’homme: «J’ai sept ou huit ans et je suis à l’école mixte ; sur le même banc que moi se trouve une fillette en robe de velours gris, aux longs cheveux bouclés blonds ; elle et moi [...]». En somme, cette ponctuation est un de ces outils que l’on peut utiliser pour «jouer, dans les replis de la phrase, sur les effets de symétrie». Plus discret que les deux-points, il exprime un non-dit, un affect plus retenu, plus secret: «On vieillit ; il fut de plus en plus rire et sourire pour faire supporter l’autre son visage. Bonheur du point-virgule», écrit Hervé Guibert dans Le Mausolée des amants.
● Le point d’interrogation
Alfred Jarry dans La Chandelle verte y voyait un «hiéroglyphe» en forme «d’oreille, ornée même, somptueusement, d’un pendant». Le point d’interrogation apparaît entre les VIIIe et IXe siècles. Mais à cette époque, il n’a pas cette forme graphique crochue que nous connaissons aujourd’hui. Comme chacun le sait, il est «emblématique de la convocation» et marque l’ignorance. «Il peut avoir des implications et des degrés différents en fonction des usages: doute, incertitude, incrédulité, etc.» Lorsque collé à un point d’exclamation, l’ordre dans lequel mettre les deux signes dépend de la nature de la phrase. Ainsi, si la perplexité prévaut, on écrit: «Vous ne croyez tout de même pas que je vais vous aider?!». Si c’est le cri, alors préférons: «Mais, dites, il court sur l’eau, votre chien!?» (Souvenirs de la cour d’assises, André Gide).
Le point d’interrogation peut être multiplié «notamment dans les dialogues ou, souvent, dans la sphère plus intime de la correspondance privée»: «Mon petit ami, as-tu fait bon voyage, toi et les tiens????» (Lettres à Catulle Mendès, Auguste de Villiers de L’Isle-Adam). Il peut également être cerclé de parenthèses pouvant ainsi introduire diverses nuances, de l’incertitude à la perplexité: «Le dernier vers est peut-être (???) un peu trop cassant de précision.» (Correspondance, Gustave Flaubert). http://www.lefigaro.fr/langue-francaise
Oui, ben moi, ce sont les trois petits points. J'en use et j'en abuse... c'est cata...
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Klada
Nombre de messages : 55 Date d'inscription : 26/04/2019
Sujet: Re: De quelques expressions de la langue française Mar 15 Oct - 9:23
Saviez-vous que sorbet vient de l'arabe ? Je l'ignorais. Explications de l'aventure de ce mots et de quelques autres :
Dix mots d’arabe que vous employez sans le savoir
«Abricot», «massage», «mesquin»... Nous utilisons ces termes au quotidien sans nous douter de la richesse de leur histoire. Le Figaro vous propose de la (re)découvrir.
Nous sommes loin de nous imaginer l’origine des mots que nous employons au quotidien. Des mots en apparence absolument banals, parfaitement ordinaires. «Moustache», par exemple! Le terme vient de l’italien mostacchio, lui-même issu du grec byzantin mustakhion, diminutif de mustac, «lèvre supérieure». Il y a le mot «robe» aussi. Emprunté au germain rouba, «butin» d’où «vêtement dont on a dépouillé quelqu’un», précise Le Trésor de la langue française.
Les mots savoureux
Le sucre que nous versons sur nos fraises, l’abricot que nous engloutissons... Nos assiettes sont remplies de mots arabes jusqu’à la tasse de café que nous avalons. Mais aussi, plus étonnant, les sorbets que nous léchons.«C’est une sorte de boisson agréable qui nous vient du Levant», ainsi que le définit Richelet en 1680. Dix ans plus tard, on trouve le mot dans le Dictionnaire universel de Furetière: «Sorbet. s. m. Breuvage qui est fort ordinaire chez les Turcs, auxquels le vin est deffendu. Il est composé de sucre et de chair de citron». «Sorbet», donc, vient de charbat, qui désigne une boisson. À l’origine, nous le trouvons sous la forme de chourba, un terme en arabe populaire qui, par l’intermédiaire du turc, a donné chorbet. Puis, enfin, sorbetto en italien. Le mot fait son entrée en langue française en 1544, au cours de la Renaissance. Ce n’est qu’à la fin du XVIIIe siècle, en 1782 exactement, que le «sorbet» désigne une «liqueur explicitement destinée à être convertie en glace».
Et qu’en est-il des épinards? Ce mets a fait grimacer plus d’un enfant... Ainsi que le raconte Jean Pruvost, «lorsque cette plante fut introduite par les Arabes en Espagne, il s’agissait de mettre en valeur ses vertus thérapeutiques». Puis, son utilisation devint culinaire. Rappelons néanmoins que le terme vient de l’arabe oriental asfanah, issu du persan, «puis à l’arabe d’Andalousie, isbinâkh, que l’on retrouve en latin médiéval spinachium mais aussi en espagnol, espinaca».
La mousseline, enfin. Seriez-vous étonné d’apprendre que ce mot nous vient de la ville de... Mossoul? «Au bord du Tigre, cette cité faisait entre autres commerce d’une toile très fine de coton ou de laine, qui, en transitant par l’Italie, mossolino, passa en français à la fin du XIIIe siècle, donnant naissance au mosulin, drap d’or et de soie fabriqué à Mossoul». Au milieu du XIIe siècle, et vraisemblablement par attraction avec le mot «mousse», mosulin donna «mousseline» désignant une «toile de coton délicate». Peu à peu, l’autre nom de la pâte à base de gomme adragante, additionnée de jus de citron, fut «mousseline». «C’est par assimilation que vinrent ensuite les brioches, les pommes dites mousselines, brioches ou purées très légères».
Les mots du corps
Qui n’a jamais réclamé à son cher et tendre un massage après une longue journée de travail? Sans doute serez-vous surpris de savoir que le mot nous vient de l’arabe massa, «toucher, palper». Terme qui donna le verbe «masser» attesté en français dès 1779. Il faut attendre le XIXe siècle pour que le «massage» apparaisse, notamment dans les ouvrages de médecine. Au XXe siècle, le «massage» prend une «dimension vitale». Ainsi parle-t-on, dès les années 1970, de «massage cardiaque».
Il existe un terme un peu moins doux et certainement plus familier: «niquer». Relativement récent, «il fait son entrée en 1890 en venant du sabir d’Afrique du Nord i-nik, ‘‘il fait l’amour’’, en partant de l’arabe nak, de même sens», précise Jean Pruvost. C’est par le biais de l’argot militaire que le terme a été introduit en langue française au sens de «posséder charnellement». Lorsque les militaires se faisaient inviter par les prostituées du pays, il n’était pas rare d’entendre la formule «faire nik-nik». À ne pas confondre avec l’expression «faire la nique» qui signifie»se moquer, mépriser».
Les mots des états d’âme
Il vous est sans doute déjà arrivé de qualifier quelqu’un de «maboul». Comprendre: «fou», «cinglé», «inconscient». Le terme est issu de la langue arabe d’Algérie: mabbhul signifie à l’origine «idiot». Le mot transite par l’argot d’Afrique en 1830, raconte Jean Pruvost et prend «un essor certain en langue française, immortalisé dans la poésie française, au point d’en avoir fait oublier leur origine».
Le «miskin» que nous entendons dans la bouche des plus jeunes est un mot arabe duquel vient l’adjectif «mesquin». À l’origine, miskin veut d’abord dire «être pauvre». Le mot voyage ensuite en Italie et devient meschino, avant de s’orthographier, en ancien français, meschin. Il signifie alors «jeune homme, serviteur». C’est lorsque «meschin» disparaît que «mesquin» prend davantage d’ampleur «avec tout d’abord l’idée de petitesse et de médiocrité, puis à partir du milieu du XVIIe siècle, celle d’avarice, témoignant d’une parcimonie déplaisante». En 1635 apparaît «mesquinerie» qui signifie «absence de grandeur, de générosité».
Nombreux sommes-nous à «avoir le cafard», parfois. «Cafard» vient de l’arabe kâfir, «infidèle, incroyant» puis «converti à une autre religion que la religion musulmane». Ergo, la notion d’hypocrite, remarque Jean Pruvost. Si le mot a pris un sens encore plus péjoratif, c’est en raison de «sa finale assimilée au suffixe populaire -ard, et le mot devint au XIXe siècle synonyme familier de ‘‘mouchard’’, notamment dans le vocabulaire des écoliers».