Jacques-René Hébert

Quelle humanité!

Le fait d'avoir partagé son pain avec le roi !

" A l'Assemblée , Hébert croise un certain Proli et bientôt les deux hommes se lient d'amitié. Berthold Proli, né à Bruxelles, est jacobin ; il passe pour être un bâtard du prince de Kaunitz, l'ancien ambassadeur de l'Empire à Versailles, l'ancien gouverneur des Pays Bas. Son cynisme ingénu amuse le Père Duchesne : il s'avoue " présomptueux , joueur, ivrogne, libertin, agioteur". Il déplore sincèrement la bienveillance que Danton et Dumouriez
, dont il se dit l'ami témoignent au-ci devant abbé Sabuguet d'Espagnac, un fripon qui, jadis, lui a fait perdre sa fortune. Hébert s'étonne : élégamment vêtu, rose , joufflu, Proli ne semble pas souffrir de la misère. C'est qu'un homme remarquable, un financier hors pair, un certain Jean de Batz, lui a permis de se " refaire".

Mais ce n'est pas possible! Ils se connaissaient tous!

Je ne sais plus où j'avais entendu parler de ce fils illégitime de Kaunitz dans les magouilles financières de la Révolution.

D'après Wikipédia, Kaunitz restera en poste en tant que chancelier jusqu'en août 1792, le jeune empereur François II l'ayant démis de ses fonctions occupées depuis Marie-Thérèse. Il mourra en 1794.

Mais son fils proche d'Hébert!
Et soutenu par le baron de Batz!

N'est-ce pas ? Le monde est petit !

"Le 20 janvier , à 2h de l’après-midi, le ministre de la justice Garat vient notifier au prisonnier du Temple sa condamnation à mort , sans possibilité d’appel au peuple et sans sursis. Hébert qui représente la Commune est là. Le compte-rendu à ses collègues sera des plus succincts :

« J’étais au Temple quand le Conseil exécutif, présidé par Garat , est venu signifier à Louis le jugement qui le condamne à mort. Là-dessus, Louis a fait les trois réclamations suivantes : »Je demande un sursis de 3 jours dans l’exécution de mon jugement pour avoir le temps de m’y préparer ; je demande pour confesseur un prêtre irlandais demeurant rue du Colombier et qu’il soit mis sous la sauvegarde de la loi ; je demande qu’il me soit permis de communiquer avec ma famille ; enfin, je demande qu’on prenne soin de mes domestiques ; il n’est pas juste qu’ils soient enveloppés dans mon malheur ».
Le première demande se trouve refusée par le décret de la Convention ; la seconde est accordée . On dit qu’un décret accorde la troisième.

L’abbé irlandais Edgeworth , l’ami de Madame de Rochechouart , le confesseur de Madame Elisabeth , se cachait depuis l’intensification de la persécution des prêtres insermentés , chez ses amis La Lézardière , aux environs de Paris. Prévenu par le défenseur du Roi, Malesherbes , il se hâte de se rendre non pas rue du Colombier , comme le dit Hébert , mais au N° 183 de la rue du Bac où Garat doit venir le chercher pour l’emmener au Temple. Et tandis que commence la lugubre veillée dans la grande tour où Louis XVI se confesse à l’abbé Edgeworth , rue St Antoine, Hébert se confie à Françoise.

Depuis le jour de la séparation de la famille royale, Hébert ne voyait plus Louis XVI avec les mêmes yeux. Son attitude noble, l’amour qu’il témoignait aux siens avait ému le délégué de la Commune. Certes, le Père Duchesne exigeait le verdict de la peine de mort pour le despote, pour le tyran , Hébert n’en souhaitait pas moins , tout au fond de lui-même, la grâce pour l’être humain. Hébert se lamente sur le sort de l’homme « si rudement frappé », dit-il , et qui parvient , malgré cela, à garder toute sa dignité. D’imaginer la tête de Louis Capet roulant dans la sciure rend physiquement malade celui, qui , dès l’enfance ne supportait pas la vue du sang.
Françoise n’aime pas les rois, n’a jamais vu Louis XVI dans son intimité, mais en femme croyante, elle ne peut souhaiter le supplice ; elle est prête à prier pour qu’il soit évité. Hébert ne lui a dit-il pas dit que des milliers de royalistes complotaient pour délivrer leur souverain ? Peut-être l’irréparable ne s’accomplira-t-il pas demain ?

Le 21 janvier , tandis que la voiture , fournie à la dernière minute par le ministre Clavière et transportant le condamné, son confesseur , les gendarmes qui les gardent, quitte le Temple et se dirige vers la place de la Révolution où se dresse l’échafaud, dans l’une des salles de l’hôtel de ville, Hébert guette les courriers qui se succèdent. Oui, le cortège avance entouré d’une quadruple haie de cavaliers en armes. Non, la foule reste calme, paraît plus abattue qu’indignée ou joyeuse. Les nerfs d’Hébert sont trop tendus ; il fond en larmes. Un collègue s’en étonne ( il le racontera plus tard aux historiens Buchez et Roux ), pourquoi le substitut du procureur pleure t-il ? Par un effort de volonté, Hébert s’est repris. Cet instant de faiblesse publique pourrait lui coûter cher. Il parvient à hausser les épaules , répond : « le tyran aimait beaucoup mon chien …Il l’a bien souvent caressé…J’y pense en ce moment. »

Un courrier essoufflé fait son apparition. Un incident vient d’avoir lieu . Alors que la voiture « royale » commençait à gravir le boulevard Bonne Nouvelle, à la hauteur du terre plein de Cléry, un homme a bousculé la garde , s’est élancé au-devant des chevaux , a crié à pleine gorge, en levant les deux bras : « A moi ! A moi ceux qui veulent sauver le Roi ! « . Trois ou quatre hommes –pas plus-tentèrent de le rejoindre ; deux d’entre eux furent sabrés ; les spectateurs n’ont pas bronché ; quant à l’homme intrépide , il a pris le parti de se fondre dans la foule ; on a perdu sa trace. Qui est-il ? On l’ignore.

Un ultime courrier fait son apparition . La guillotine a fait son œuvre. Le Roi est mort. "


Incroyable cette ultime volte-face d'Hébert !

Et que dire de Chaumette ? Guère mieux qu'Hébert , semble t-il !

"Ce soir-là, Chaumette , toujours chaussé de ses sabots, dîne chez l’un de ses amis , « le juge interrogateur » ( nous dirions , aujourd’hui le commissaire de police ) Froidure. Le procureur , lui aussi , se lamente : « Qui peut retenir ses larmes dans une calamité pareille ? Faire périr ainsi ce malheureux roi ! Non, il est impossible que son sang ne retombe pas sur ceux qui l’ont versé ! « .

Ces paroles imprudentes , soigneusement notées par le conventionnel Bô, seront violemment reprochées à Chaumette lors de son procès. «

Incroyable , ces révolutionnaires pleurant à chaudes larmes la mort du roi qu'ils ont condamné à mort !

C'est vraiment stupéfiant!
Hébert qui pleure pour Louis XVI ?
Mais alors, pourquoi a-t-il fait autant de mal à Marie-Antoinette et Louis XVII ? Et indirectement à Marie-Thérèse et Elisabeth ?

Par Hébert, on apprend que Louis XVI aimait bien les animaux de compagnie, même s'il ne s'agit pas de chat.

Et Chaumette également ?!!!

Mais enfin, ils avaient le pouvoir de le sauver!

Leur attitude est vraiment étonnante, voire surprenante. Qui peut dire combien l'attitude de Louis XVI n'avait pas touché ces hommes durs et méchants ?
Oui, ils avaient le pouvoir de le sauver mais ils ont eu peur de le faire. Ils espéraient un miracle sans doute.
Je sens qu'à la lecture du livre de Marina Grey, je ne suis pas au bout de mes surprises...

Oui, je crois aussi que beaucoup de ces abominables individus ont été particulièrement bouleversés face à l'attitude de Louis XVI.
Mais trop lâches, hélas!

Absolument !

Madame de Chimay a écrit:

Incroyable cette ultime volte-face d'Hébert !

Si elle vraie, ce qui est pour le moins surprenant, ce type était vraiment un grand malade.
Après tout ce qu'il a craché sur le couple royal, voilà qu'il joue sa midinette éplorée lorsqu'il touche enfin au but ?!

Je crois qu'il était vraiment fou.

C'est du moins la thèse de Marina Grey que je vous expose ici.

« Hébert , lui, endosse tant bien que mal sa nouvelle peau de régicide. Ce qui est fait est fait. Le Père Duchesne doit préserver son image de marque, hurler avec les loups, plus fort qu’eux si possible. S’il ne peut s’empêcher de noter que « Capet a été ferme et dévot jusqu’au dernier moment », il corrige hâtivement cette vérité par un mensonge : « En mourant , il s’est flatté que son fils régnerait et le vengerait en faisant tout le mal qu’il n’a pu faire lui-même ».
De peur de se montrer trop modéré , le Père Duchesne ajoute : « Sa femme et sa bougre de race vivent encore : vous n’aurez de repos que lorsqu’ils seront détruits . Petit poisson deviendra gros , prenez-y garde , foutre, la liberté ne tient qu’à un cheveu. «

Cette phrase qu’il écrit évoque pour Hébert , l’incident du terre-plein de Cléry. La liberté du Roi , aussi, n’avait tenu qu’à un cheveu…
Le substitut du procureur connaît maintenant , grâce aux rapports des policiers, tous les détails du projet d’enlèvement avorté. Par des dénonciations parvenues à divers comités, ceux-ci avaient appris l’existence d’un » complot de la dernière chance ».600 hommes , des royalistes très jeunes pour la plupart , projetaient de délivrer Louis XVI sur le chemin de l’échafaud et comptaient pour ce faire sur l’aide spontanée des spectateurs. Le 20 janvier , l’ordre fut donné à la police de « consigner « sous peine de mort , les Parisiens de moins de 28 ans jusqu’à l’issue fatale. Le chef de ce complot , âgé de 38 ans , ne fut donc pas touché par la mesure , mais au moment d’agir, il s’était trouvé tout seul ou presque. Qui était-il ? Un ci-devant baron , un nommé Jean de Batz.

Ce Batz , que Robespierre tiendra à juste titre , pour son pire ennemi, qui deviendra le maître d’œuvre de la chute des Girondins, des Hébertistes, des Dantonistes, enfin de Robespierre lui-même, qui manquera de peu triompher le 13 vendémiaire , que Louis XVIII , proverbialement ingrat, ne récompensera que par une croix de St Louis et le grade de maréchal de camp , mourra ruiné et oublié de tous en 1822.

Il faudra attendre l’année 1896 et la publication par G Lenotre de son Baron de Batz pour que les historiens commencent à s’intéresser à ce personnage clef de la Révolution Française. En 1969 , Arnaud de Lestapis dévoile dans sa « Conspiration de Batz », d’autres exploits de celui qu’il nomme « l’homme invisible », et dont beaucoup de faits et gestes demeurent encore mystérieux ."


Encore ce baron de Batz...Je sens que je ne vais pas tarder à lire ce livre de Lenotre et à ouvrir un fil sur lui.
Oui, je crois qu'il y a beaucoup de fous chez les révolutionnaires...
Fabre d'Eglantine en était un . Hébert en est aussi un beau spécimen.

Cette biographie d'Hébert est palpitante! Je ne l'aurais jamais cru.

C'est tout le talent de Marina Grey. C'est un auteur de grand talent et je ne peux qu'inciter à lire son livre !

Merci de nous la faire partager!

Madame de Chimay a écrit:

Encore ce baron de Batz...Je sens que je ne vais pas tarder à lire ce livre de Lenotre et à ouvrir un fil sur lui.

Un fil est déjà ouvert à son sujet.
J'y ai transféré vos messages.
A noter que Majesté et vous n'avez apparemment pas les mêmes sources au sujet de sa date de naissance...

C'est ici : https://maria-antonia.forumactif.com/ses-relations-amicales-f5/le-baron-pierre-louis-de-batz-t212.htm

Le 20 janvier , un royaliste fidèle et exalté , Pâris , décidé à venger la mort imminente du Roi , avait assassiné Le Peltier de Saint Fargeau , l’un des conventionnels » régicides ».
Le 24 janvier , les restes du député devaient être portés en triomphe au Panthéon. Le « patriote Palloy « pour l’occasion , décore à ses frais le club des Cordeliers et certaines rues où le cortège doit passer.

Dommage que mon scanner ne fonctionne pas. Il y a une illustration dans mon livre sur cet assassinat. Cette gravure provient du musée Carnavalet.
Décidément , on retrouve toujours Palloy !

Si c'est pas David, c'est Palloy!

J'étais persuadée qu'Hébert et Chaulette s'entendaient comme larrons en foire. Bah,non, les amitiés d'Hébert sont toutes autres!

Chaumette avait des amitiés très particulières...
Et puis, il avait un côté paysan pas très propre. Hébert était tout le contraire. Il aimait les mises bien soignées, toujours tiré à quatre épingles et puis il était marié.
Bon, cette fois-ci, je vais me coucher. Décidément , ce livre est super palpitant.

Bonne nuit , chère Olivia.

Merci encore!

C'est fou, Hébert se la jouait champion des sans-culottes, s'est créé un personnage hyper vulgaire, grossier et il épouse une petite nonne, s'habille à la dernière mode, toujours nickel... Ce qui ne l'empêche pas d'avoir des idées tordues.
Reconnaissons à Robespierre qu'il ne s'est pas abaissé à placer à tout bout de champ "foutre" pour devenir célèbre.

Bonne nuit à vous chère princesse!

olivia a écrit:

Mais ce n'est pas possible! Ils se connaissaient tous!

Je ne sais plus où j'avais entendu parler de ce fils illégitime de Kaunitz dans les magouilles financières de la Révolution.

Proly fut, pendant un temps, secrétaire particulier et protégé de Hérault de Séchelles .
Il avait vécu sur un si grand pied, avant la Révolution, qu'en 1789, ruiné, il n'a plus d'autres ressources que la spéculation en bourse . En 1791, il est assez renfloué pour fonder le journal Cosmopolite .

Il participe activement aux journées du 31 mai et 2 juin 1793 qui verront la chute de la Gironde . Sous le commandement de Hanriot, les sans-culottes et la Garde nationale investissent la Convention qui est sous la présidence de Hérault de Séchelles . Hérault tente de calmer le jeu, mais Marat ordonne que la séance se poursuive, sous la menace des canonniers de Hanriot .
La Convention vote l'arrestation de 29 députés de la Gironde et deux ministres ( Clavière et Lebrun ) . Roland réussit à prendre la fuite, mais Mme Roland est arrêtée ........

Proly, qui est hautement suspect justement parce qu'on le sait l'enfant naturel de Kaunitz, sera complice de la volte-face de Dumouriez devant l'ennemi autrichien, en ne la dénonçant pas en temps ...