Je suis allée voir Les Adieux à la Reine, hier après-midi, comme prévu . Alors voici mes impressions . Tout d'abord, je dirais que le film est absolument fidèle au livre dont on retrouve bien l'atmosphère de délitement d'une société hébétée .
Manque de chance, je n'avais pas adoré le livre pour toutes les raisons que j'ai déjà dites vingt fois. Je n'y reviendrai pas .Je suis cependant plutôt heureusement surprise car il est impossible de nier la beauté des images, le charme intimiste de la narration, et le jeu remarquable des actrices . Mais la scène finale est à vomir .
Une remarque : Jacquot ignore complètement les personnages de Diane et Vaudreuil . C'est tant mieux ! Chantal Thomas avait fait d'eux du grand n'importe quoi, des amants pour tout dire .
Cela dit, tout le film baigne dans un halo saphique extrêmement gênant, qui accrédite les rumeurs, les pamphlets, ravale Marie-Antoinette au rang d'esclave énamourée d'une Mme de Polignac vicieuse et perfide .
Le personnage de Sidonie me rappelle furieusement la Melle de Méricourt de Claude-Emile Laurent , toutes deux ( petites domestiques ) portant à Marie-Antoinette une vénération plus qu'ambigüe et partageant la même jalousie inavouée pour Mme de Polignac .
Comme tout le monde dans le Boudoir j'ai spécialement apprécié la peinture des domestiques qui fourmillent dans les coulisses du Château, les rapports entre maîtres et serviteurs, la confusion qui brouille les cartes, les réactions très diverses selon que l'on est duc, marquis ou menu fretin .....
Et bien sûr, les décors ne sont pas de Roger Harth !
Les dialogues ne sont pas du tout travaillés pour tendre vers un langage XVIIIème . C'est dommage !
Particulièrement déplacé le " On s'en fout de la pendule de M. Janvier ! " d'Henriette qui s'oublie sans doute .
Léa Seydoux est émouvante et juste. Diane Kruger campe une Marie-Antoinette positivement écorchée vive . J'ai cependant trouvé outrée sa scène de colère quand le roi refuse de partir . Et que dire de son obsession pour Mme de Polignac qui semble reléguer au second plan le cataclysme politique ?
Il est bien montré combien la reine n'est JAMAIS seule , ce qui rend encore plus choquante la fameuse scène de la Galerie des Glaces où Marie-Antoinette et Mme de Polignac, sous les yeux médusés de toute la Cour, s'éloignent enlacées vers les appartements privés .
Campan est parfaite (
à part son "on s'en fout " ), Bertin assez ressemblante, Mme d'Ossun trop âgée ( elle est la soeur du duc de Guiche, pas une vieille peau ), inattendu Jacob Nicolas Moreau pompette, vautré dans un couloir, cocasses les La Tour du Pin qui parlent anglais pour déjouer les oreilles collées aux trous de serrures ...... Louis XVI pas mal, Provence pas mal, mais Artois est tout nabot, lui qui devrait être grand et svelte un peu bellâtre .
Je comprends maintenant les fines allusions au caso d'un gondolier . Ce qui m'amène au personnage de Mme de Polignac (
je me refuse à l'appeler Gabrielle ) . Tout a été dit sur l'allure, le maintien, la démarche, l'air conquérant et provocant de Virginie Ledoyen qui ne connaît nullement son personnage historique, mais colle à merveille à celui du livre de Chantal Thomas .
Or donc, Mme de Polignac prend du bon temps avec son gondolier . Cependant, si elle préfère les hommes, il est plus que suggéré qu'elle se prête aux mignardises de Lesbos pour complaire à la reine complètement raide dingue folle de son corps ! La duchesse fait ni plus ni moins la putain pour enrichir sa clique, en résumé . Elle a un rôle particulièrement muet . Normal, elle n'a aucune parole de tendresse ou de réconfort pour Marie-Antoinette qu'elle se contente d'écouter ( l'écoute-t-elle seulement ? ) avec un visage dur et fermé .
La duchesse du livre se mettait à pleurer comme une madeleine au moment de son départ, on se demande bien pourquoi ( ?!!! ) vu le portrait qu'en avait tracé auparavant Chantal Thomas dans la fameuse scène de la robe verte . Celle de Benoît Jacquot n'a pas un tressaillement d'émotion .
Cette dernière scène du film, avec l'échange d'identité entre Mme de Polignac et Sidonie pour que la lectrice meurt à la place de la duchesse dans l'éventualité d'un assassinat, cette nudité de Sidonie qui avale ses larmes sous l'oeil froid de Marie-Antoinette, fait de la reine un véritable monstre .
Comment Chantal Thomas a-t-elle pu imaginer pareille horreur ?
Et ce baiser sur la bouche " Dites à la duchesse que je penserai toujours à elle .... ", c'est le pompon !
Quand on pense que le grand public ne connaît pas Marie-Antoinette !!! J'ai entendu des réactions en sortant de la salle, à faire frémir ... L'image de la reine n'en sort pas grandie mais encore plus avilie .
Non, vraiment non !